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Photo du rédacteurEstelle Basquin

La disponibilité de cerveau ne s’achète pas sur Amazon

Se lancer : assumer de changer de rythme et se donner le temps.

(article écrit en février 2019)




8 ans.

C’est le nombre d’années que j’ai passé dans l’écosystème entrepreneurial depuis que j’ai commencé mon parcours professionnel : 4 ans dans une jeune startup (de ses quasi-débuts à sa première levée de fonds), et 4 ans à la tête d’un incubateur académique pour aider les jeunes entrepreneurs à se développer.

8 ans qui m’en paraissent le double tellement le rythme du milieu de l’innovation est dense. Tout est mouvant, perpétuellement : les équipes, les missions, les stratégies, les produits, les services, les outils, les technos, les initiatives, les décisions…et j’en passe.

J’ai aimé ce rythme, préféré prendre cette direction plutôt que de m’enfermer dans un métier trop sclérosé et dans un quotidien trop routinier, j’ai aimé jongler, passer du coq à l’âne, de la stratégie à l’opérationnel, imaginer et réinventer sans cesse nos offres pour les adapter à nos diverses cibles, être un véritable couteau-suisse.

Je me suis aussi usée. A passer d’un sujet à un autre en permanence, à m’éparpiller, à être à fond, tout le temps, dire oui à (presque) tout, être réactive (le plus possible), à rester en veille permanente sur mes sujets (par intérêt et professionnalisme), à vouloir être partout à la fois. Un cerveau en sur-chauffe, qui n’arrive pas à calmer le flot de ses pensées.

Pour ça, j’ai décidé d’appuyer sur pause. Plusieurs fois, de différentes manières. Un treck dans le désert marocain sans rien d’autre que mon sac et mes jambes pour me porter, des voyages un peu loin pour me dépayser, des vacances au calme dans la nature et avec mes proches pour me ressourcer. Ça a souvent marché, j’en revenais requinquée, mais souvent ça ne durait pas. J’avais envie d’autre chose, mais mon cerveau n’arrivait pas à penser à la suite.

J‘avais cette image du verre perçé qui laisse s’échapper un petit filet d’eau, mais qu’on remplit en permanence pour ne pas qu’il désemplisse.

J’ai compris que ce rythme ne me permettait pas de me poser sur les sujets qui m’intéressent plus particulièrement et qui demandent justement du temps : accompagner cet être complexe qu’est l’humain, qu’il soit entrepreneur ou pas. Alors j’ai décidé de quitter ce job qui ne me convenait plus, et de me lancer. #BigStep !!


9 mois

C’est le temps qui s’est écoulé entre le moment où j’ai décidé de partir et le moment où j’ai réellement quitté mon job. Ça parait long. Ça a été long. Mais ça m’a aussi permis d’amorcer ce changement en douceur, pour éviter de passer d’un rythme de 200% à 0.

Plus concrètement, cela s’est passé en trois temps. 1 mois pour aller parler à mes boss et négocier mon départ, 5 mois à 100% (dont quelques semaines de vacances estivales), et 3 mois de transition: 2 jours par semaine de mission en indépendante pour transmettre les sujets, les 3 autres jours pour me consacrer à la suite.

Pour couper et acter ce changement de posture, je suis partie une semaine faire un stage de surf & yoga. Une première pour moi (le surf !), et un super souvenir. Surtout, le pari réussi de lâcher le mental pendant une semaine, et ne penser à rien. Ni au passé, ni à l’avenir. Rester focus sur le temps présent.

Mon rapport au temps a été pas mal chamboulé dans ces 3 mois de transition, car il se passait plein de choses, de tous les côtés : l’excitation du début, le plaisir des rencontres et des discussions, l’impatience de passer à autre chose, la peur de quitter un environnement confortable, les montagnes russes émotionnelles dans une journée, la joie du champs des possibles et des projets qui se dessinent, la sensation de pouvoir gérer mon temps, tout en voulant optimiser ces 3 nouvelles journées pour moi, en m’occupant des choses-perso-qu’on-doit-faire-mais-qu’on-n’-a-jamais-le-temps-de-faire et en commençant à développer cette nouvelle activité. Accélération et ralentissement, de manière simultanée. Extrêmement étrange.

Pour autant, j’avais encore du mal à me projeter complètement. Encore un pied dans mon job, l’autre dans le nouveau. Des allers-retours permanents. Une envie de prendre mon temps et une envie d’avancer. Un curseur qui alterne entre ces différentes polarités : impatience et besoin de prendre du recul. Refaire de la place.

Et puis la fin d’année est arrivée. Avec le classique break de Noël, salvateur, comme souvent. Je savais qu’il marquait la fin d’une tranche de vie et l’aube d’un nouveau départ.

Mon cerveau gagnait petit à petit en disponibilité, mais je réalisais que j’avais quand même du mal à faire 36 choses à la fois. Aveu de faiblesse ? Pas vraiment, plutôt un déclic sincère qui allait me dicter la suite : prendre le temps de m’organiser, prendre du recul, et me laisser atterrir en douceur dans ma nouvelle vie, pour y voir plus clair. Sans précipitation, sans obligation.


31 jours

C’est donc le temps que j’ai décidé de m’accorder “officiellement” avant de me (re)mettre dans mon sujet et en action.

Les deux premières semaines n’ont pas été si faciles. Un peu (beaucoup ?) d’anxiété, un sommeil perturbé, du mal à lâcher prise et à assumer en pratique ce début d’année “tranquille” (parce qu’en théorie, aucun problème !).

Et puis petit à petit, la tranquillité d’esprit m’a gagnée. Je l’ai réalisé quand je suis allée me faire un ciné un jeudi à 11h, sans culpabiliser :) Lecture, expo, week-end au vert en amoureux, hammam, bain en pleine journée, écoute de podcasts, début de méditation, cours de yoga, déjeuners & cafés avec un tas de copains, soirées d’anniversaires, de Noël en retard, balades & rando…tout ça est venu se caler entre des RDVs clients / réseau déjà planifiés, que j’avais gardé. Janvier a quand même ce côté “hibernation” assez propice pour se faire du bien en restant au calme. Je recommande !

Ce changement de rythme dans mon quotidien n’a pas été sans heurt non plus. Alternance de phase “boostées” et de phases “down”, qui interrogent, et qui m’ont en même temps permis de me replonger naturellement et sans pression dans mes sujets, de commencer à définir mes objectifs, professionnels et personnels, de commencer à ancrer certaines habitudes, pour ne pas les laisser tomber quand le rythme sera plus soutenu, pour poser les bases de la vie que j’ai envie de me construire, maintenant que tout est possible et entre mes mains.

L’écriture de cet article est un des effets positifs de ce changement. J’ai longtemps souhaité partager des apprentissages, des observations, sans prendre le temps et mon courage à deux mains pour le faire.

J'ai eu envie de partager mes premières leçons tirées en tant qu’entrepreneure / indépendante / coach en devenir / ex-intrapreneuse et salariée, qui baigne depuis longtemps dans un environnement (voire dans un monde) qui va à 2000 à l’heure :

  • Acceptez que les choses prennent du temps

  • Acceptez qu’un changement ne se fait pas en un jour

  • Acceptez qu’il y aura des jours avec et des jours sans, vivez-les : même si ces derniers ne sont pas les plus agréables, dites-vous qu’ils ne durent pas !

  • Accordez-vous des moments de break, sans culpabiliser

  • Apprenez à être seul(e)

  • Assumez votre rythme et vos besoins, on n’est pas tous fait pareil

  • Laissez le temps au temps

  • Perdez du temps, prenez votre temps : l’ennui est propice à la création !

  • Ne vous dévalorisez pas et ne vous en voulez pas si vous n’arrivez pas à développer un nouveau projet professionnel en même temps que votre job actuel : la dispo de cerveau ne s’achète pas sur Amazon ;)


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